Gingerize the Lotus, mes recettes végétariennes gourmandes.

jeudi 29 septembre 2011

Apple Pie, digressions.







Ma sœur, citant Les Inconnus pour me dire qu’elle voulait faire du pulco de moi, me proposa de se retrouver pour le déjeuner entre deux cours à Sciences Pal’ pour elle, entre deux chapitres de Darkness Visible pour moi. Nous décidions d’aller découvrir la cuisine du restaurant et salon de thé irlandais Apple Pie. Ou plutôt, je la traînais là-bas, d’abord parce que je suis l’ainée, ensuite parce que je suis végétarienne et que pour une fois je voulais bicher dans un lieu où les options omnis n'ont pas le monopole!
Il fut question de son week-end d’inté et pour renchérir sur ses descriptions poétiques, je lui faisais un inventaire de la malle que j’emporte avec moi à Aix. Dedans, il n’y aura pas les billets du festival qu’il s’est occupé de réserver.
La première fois qu’il m’a pris la main, c’était à un concert de Cocoon aux Transmusicales, Marc (le chanteur) avait partagé un verre de vin rouge bio avec moi (le même verre) mais mon allégresse de groupie n’avait pas découragé M., qui m’invitait au cinéma la semaine suivante.

Nous allions voir I’m not there et chantions ensuite I Want You en battant le pavé humide des ruelles de Rennes.
Pour fêter ses dix-neuf ans, j’invitais M. au concert de Patrick Watson, qui nous émouvait tous deux et que je revis en concert aux Vieilles Charrues l'été suivant. Mais entre-temps, M. avait déserté Rennes et il n’était pas question d’aller-retours entre Rennes et Aix-en-Provence.
Il y a deux ans, quand nous nous sommes retrouvés dans un café de Marseille, je ne reconnaissais pas celui que j'avais moqué pour sa touffe de cheveux et qui les coupait ras à présent, avec qui je jouais au basket pour me détendre avant les khôles d'histoire et qui s'était mis à la boxe depuis, qui m'avait raconté la Guerre Froide et Mai 68 avec l'emphase assez touchante d'un idéaliste mais avait découvert ensuite l'ennui poisseux des amphis de fac de droit.
Je ne lui avouais pas d'emblée combien mes goût musicaux avaient évolué, il vit que j'avais coupé au carré mes cheveux dont il avait eu pour habitude de moquer le crêpage en chignon haut perché, que je ne jouais plus au basket et revenais d'un stage de plongée, que je ne voyais plus la prépa comme une bonne préparation psychologique à la vie professionnelle mais comme le purgatoire aux ambitions, qui m'avait fait choisir de rejoindre les bancs de la fac d'Anglais où je comptais bien m'ennuyer salement.
Et finalement on parla musique, il m'avoua s’endormir en écoutant Patrick Watson et je confessais ne plus supporter Cocoon qu’après beaucoup plus d’un verre de vin. C’est en s’enthousiasmant pour des titres de Miike Snow, d’électro, de house et de techno que notre bonne entente a tenu la distance. Tenir la distance en pogotant sur les mêmes mixes, lui à Aix et moi aux Etats-Unis, tenir la distance en se cachant derrière des échanges de remixes abrasifs, et finalement ce week-end ce sera fabuleusement tripique et pathétiquement symbolique d’aller à Marsatac ensemble.

Dans ma malle il y aura un sèche-veuchs (oui, le brushing est indéniablement une profession de foi poétique), du polo rose Ralph Lauren (même si a horse is not a home ahhh j'adore!) et du pantalon rouge (je porte les deux ensemble, c’est aussi très subtil), et des cadeaux (je passe sur l’inventaire de mes cosmétiques ? Je suis à peu près aussi naturelle que ma prose est alambiquée). Cet album de photos de nos vacances en Grèce qu’il n’a pas reçu et qui me fut retourné. Il forçait la boîte aux lettres de sa voisine pour s’emparer de mes lettres mais du colis il ignore encore le contenu, je lui ai dit avoir perdu mon appareil photo dans le train du retour, je lui ai fait oublier tes belles photos prises à notre retour, Fadosol, et je laisserai l’album sous son oreiller lundi matin, dans quatre jours, dans longtemps. Il y a aussi ce DVD, Breathless de Yang Ik-June.
Je racontais à ma sœur la merveilleuse soirée dans la petite cour d’un cinéma athénien où avait été installé un écran géant sur fond de lierre et de glycine, encadré de pots de basilic odorant. Il découvrit A Bout de Souffle sous-titré en Grec, je ne murmurais pas les répliques de ce film que je connais par cœur pour l’avoir regardé chaque soir de chaque semaine d’une année d’obsessions cataclysmiques (et pour le coup poétiques). Ma sœur feignait de trouver ça trop-chouuu mais voulant tempérer ma grandiloquence cérémonieuse, je lui avouais avoir choisi ce thriller coréen parce que lui et moi raffolons d’Old Boy, Mother et autre Memories of Murder.
Pathétiquement symbolique, disais-je.





Le déjeuner fut incroyablement agréable, Claire et moi avons commandé le trio de salades, servi avec une part de cake aux tomates séchées (d’un moelleux formidable) et du pain bio à l’instar de tout ce qui est au menu (un menu simple et qui change au fil des envies de la chef et des saisons).
Evidemment nous y retournerons pour goûter les desserts (cheesecake, scones, cupcakes…), peut-être pour le brunch et certainement pour saluer la cuisinière, d’une gentillesse incroyable, qui nous racontait son militantisme écologiste avec un charmant accent irlandais, m’invitant à converser avec elle dans la langue de O’Casey.
Chaque deuxième samedi du mois, anglophones et anglicistes se retrouvent rue de la Chalotais pour discuter ensemble à l'heure du tea time et le rapport qualité-prix d’Apple Pie tient la route, alors je vous vous invite à découvrir cette adresse comme on aimerait en trouver davantage à Rennes !

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